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CAPHARNAÜM

Un film de Nadine Labaki.

 

 

Dans ce film, tout comme dans « Cold War », le somptueux film de Pawel Pawlikowski, on a droit à une épanadiplose, c’est-à-dire à une scène similaire apparaissant au début et réapparaissant à la fin de l’oeuvre en complétant ou en renouvelant ce qui a été montré au commencement. La comparaison s’arrête là car, autant le film du Polonais préserve scrupuleusement la liberté du spectateur en lui accordant un espace de respiration et de participation, autant ce long-métrage prend le parti contraire, s’ingéniant à immerger le spectateur dans un océan d’émotions qui l’étouffe sans lui laisser d’autre choix que celui de l’acquiescement.

Et la réalisatrice de « Capharnaüm » n’y va pas de main morte. Dès le début, le ton est donné à la manière d’un uppercut : le petit Zain, que la caméra ne va quasiment plus quitter, apparaît menotté face à un juge à qui il n’est pas même capable de donner son âge (on suppose qu’il a douze ans). Or, si ce gamin comparaît au tribunal, c’est pour avoir donné un coup de couteau à un homme (dont on apprend, plus tard, qui il est et pourquoi l’enfant l’a blessé).  Mais aussitôt c’est lui, l’enfant, qui se change en accusateur, portant plainte contre ses propres parents à qui il reproche rien moins que de l’avoir mis au monde !

Comment un enfant de cet âge peut-il en arriver à cette extrémité ? Cela paraît impossible. Or la réalisatrice s’ingénie dès lors à prouver par a + b que ce gamin ne pouvait pas ne pas en arriver à une telle résolution. Pour ce faire, comme je l’ai déjà laissé entendre, elle engloutit le spectateur sous un déluge de misérabilisme. Tant de misérabilisme qu’on en est anéanti et qu’on suffoque sans pouvoir trouver les moyens de la respiration. Tant de misérabilisme que, en fin de compte, il n’y a plus de place pour rien, même plus pour l’émotion.

En fin de course, quand on retrouve le petit Zain devant le juge et qu’il se met à maudire la vie qui lui a été donnée et toute vie que ses parents pourraient encore donner, que peut-on faire sinon acquiescer ? La réalisatrice a pris, en quelque sorte, le spectateur en otage, et elle l’a sonné ! Il ne lui reste plus qu’à quitter la salle, à respirer un bon coup et à retrouver vite fait le goût de vivre ! 

3/10

 

                                                                       Luc Schweitzer, ss.cc.

 

Tag(s) : #Films
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