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SHIBUMI

un roman de Trevanian.

 

Est-ce parce que son auteur (de son vrai nom Rodney Whitaker 1931-2005) n'a cessé d'entretenir le mystère autour de sa propre personne qu'on lui accorde une telle reputation? Je n'en sais rien, mais toujours est-il que j'ai du mal à comprendre les louanges accordées à cet auteur et à ce roman en particulier ! La lecture n'en est pas désagréable, mais il ne s'agit, somme toute, que d'un roman d'espionnage à la trame on ne peut plus rebattue et au texte pollué tout du long par une multitude de partis pris qui laissent pantois.

Son héros se nomme Nicholaï Hel, il est élevé au japon où il est initié au jeu de go au point qu'il en devient un maître. Mais, arrêté et torturé par les Américains, lui qui rêvait d'atteindre le shibumi, sorte de détachement suprême transmis par la sagesse japonaise, en vient à mener une vie de vengeur et de tueur des plus expérimentés. Enfin, il décide de se retirer au Pays Basque, de se consacrer à sa passion pour la spéléologie en compagnie d'un étonnant et truculent compagnon appelé Le Cagot, de se délecter dans la volupté d'aimer avec sa compagne Hana, en résumé d'atteindre enfin le shibumi tant désiré. Mais le destin le rattrape en la personne d'une jeune femme prénommée Hannah, poursuivie et recherchée par une agence internationale aux visées meurtrières, la Mother Company, et qui ne demande qu'à en profiter pour se débarrasser du même coup de Nicholaï Hel en personne.

Rien de très original dans cette trame qui associe l'espionnage et l'aventure en les agrémentant d'un soupçon d'érotisme, comme je l'ai déjà indiqué. Il n'y a pas de quoi s'extasier. Ce qui donne au roman un peu d'intérêt, ce sont quelques-uns de ses personnages et les contextes dans lesquels ils évoluent. Mais malheureusement, sur ce point-là, l'auteur a cru bon de farcir son livre de tous les préjugés possibles sur les individus, les peuples et les nations. Au point que ça en devient de plus en plus agaçant au fil des pages. On ne sait pas s'il faut attribuer tous ces préjugés à l'auteur lui-même ou aux personnages caricaturaux qu'il a imaginés, toujours est-il que, même si l'on peut prendre un peu de plaisir à la lecture du livre, on ne peut pas ne pas en repérer les gros défauts. Le personnage de Le Cagot, aussi fantasque soit-il, apparaît comme un fleuron de la caricature. Les Japonais, les Français, les Basques, tous les peuples n'ont droit qu'à un traitement des plus conventionnels, farci de tous les clichés habituels et mille fois rabâchés. Mais le pire, c'est le sort réservé aux Américains qui sont décrits comme n'étant tous que des marchands ignares, un peu comme si tous les habitants des Etats-Unis étaient des clones de Donald Trump. Je veux bien admettre qu'il y ait pas mal d'individus de cette espèce dans ce pays, mais de là à leur mettre à tous une telle étiquette !!! Même l'ordinateur de la Mother Company semble atteint par les limites que l'auteur se délecte à attribuer aux Américains !

Cet anti-américanisme primaire ainsi que tous les autres raccourcis et préjugés dont le livre est rempli nuisent beaucoup à sa qualité. Que certains critiques parlent de ce roman comme d'un des « plus grands de la littérature américaine » me déconcerte totalement. Fort heureusement, il ne manque pas de grands écrivains aux Etats-Unis dont les œuvres sont de qualité bien supérieure à « Shibumi ».

5/10

 

Luc Schweitzer, ss.cc.

Tag(s) : #Livres, #Romans
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