Dans l'ouvrage que l'écrivain italien Claudio Magris a consacré au Danube, à la page 96 de l'édition Folio, au cours d'une section traitant de la ville d'Ulm, se trouve un court et superbe chapitre évoquant les figures de la résistance allemande à l'ordre nazi, Hans et Sophie Scholl. Je ne peux rater cette occasion qui m'est offerte de transmettre à nouveau mon admiration profonde pour ces jeunes gens. Ni l'un ni l'autre n'étaient des saints, mais ils ont osé défier ceux qui semaient la terreur et la mort, quitte à le payer de leur propre vie. Voici le texte de Claudio Magris, concis et allant à l'essentiel:
"C'est à Ulm que s'est épanouie l'une des plus belles fleurs de l'intériorité allemande. Hans et Sophie Scholl, le frère et la soeur arrêtés, condamnés à mort et exécutés en 1943 pour leur lutte active contre le régime hitlérien étaient d'Ulm et aujourd'hui leur nom a été donné à une école supérieure. Leur histoire est l'exemple de la résistance absolue qu'Ethos oppose à Kratos; ils ont su se révolter contre ce qui semblait à presque tout le monde une évidente et inévitable acceptation de l'infamie. Comme l'a écrit Golo Mann, c'est à mains nues qu'ils combattaient contre la formidable puissance du Troisième Reich, ils affrontaient l'appareil politique et militaire de l'Etat nazi armés de leur seule ronéo, avec laquelle ils diffusaient des tracts contre Hitler. Ils étaient jeunes, ils ne voulaient pas mourir et ils n'avaient pas envie de dire adieu au charme des beaux jours, comme le dit tranquillement Sophie le jour de son exécution, mais ils savaient que la vie n'est pas la valeur suprême, et qu'on ne peut l'aimer et en jouir que lorsqu'elle est mise au service de quelque chose qui la dépasse, et qui l'éclaire et la réchauffe comme un soleil. C'est pour cela qu'ils sont allés sereinement à la mort, sans peur, sachant bien que le prince de ce monde est déjà jugé."
N.B.: Ethos se rapporte à la morale (l'éthique), Kratos à la guerre.
Luc Schweitzer, ss.cc.