Un film de Ildikó Enyedi.
L’étrangeté de ce film hongrois (Ours d’Or du festival de Berlin) déconcerte autant qu’elle séduit. L’histoire a de quoi envoûter mais elle a aussi de quoi désemparer : elle veut faire se juxtaposer et dialoguer des scènes oniriques avec des scènes réalistes (et parfois très crues) mais au risque d’un manque de crédibilité ou d’une sorte d’artificialité. Les idées de scénaristes peuvent sembler originales et intéressantes sur le papier mais s’avérer peu plausibles dès qu’elles sont portées à l’écran.
Dans ce film, on a affaire à deux personnes qui se rencontrent dans un cadre professionnel, celui d’un abattoir : Endre en est le directeur et Mária la contrôleuse des qualités sanitaires. Le premier est gêné par un handicap physique : un de ses bras reste totalement inerte. La deuxième, malgré ou à cause de sa blondeur, connaît de sérieux blocages sur le plan psychique, blocages qui lui donnent une apparence de grande froideur. Or, ce sont ces deux êtres qui se découvrent un point commun : tous deux, durant leur sommeil, font exactement le même rêve. Dans un superbe paysage de forêt enneigée, ils se retrouvent, s’approchent et se touchent sous la forme, lui d’un cerf, elle d’une biche.
Le contraste est fort entre le rêve et la vie réelle : d’un côté des animaux fiers et libres, de l’autre un abattoir qui sacrifie des bêtes pour nourrir les humains ; d’un côté, l’approche tendre de deux animaux sans inhibition, de l’autre un homme et une femme empêtrés dans leurs entraves physiques et/ou psychiques. Bien sûr, le scénario ménage une gradation des rapports entre l’un et l’autre. C’est un peu comme s’il fallait se libérer du rêve des animaux sauvages pour transformer peu ou prou la réalité de la liaison qui tente de se nouer entre Mária et Endre.
Le film paraît assez juste et plutôt touchant lorsqu’il se concentre sur ces deux personnages de mal-aimants qui sont fascinés l’un par l’autre et veulent aimer quand même. Mais on peut en trouver peu judicieuse la réalisation lorsqu’il s’agit de passer (le plus souvent artificiellement) des scènes réalistes aux scènes oniriques. Quant à tous les personnages secondaires du film (ceux qui travaillent à l’abattoir, par exemple), ils n’ont pas plus de présence que des stéréotypes. Ils ne sont là qu’en tant que faire-valoir.
6/10
Luc Schweitzer, ss.cc.
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CORPS ET ÂME Bande Annonce (2017)
Mária, nouvelle responsable du contrôle de qualité et Endre, directeur financier de la même entreprise, vivent chaque nuit un rêve partagé, sous la forme d'un cerf et d'une biche qui lient ...