Un film de Nabil Ayouch.
Faire un film choral n’est jamais chose aisée et, malheureusement, Nabil Ayouch n’a pas su totalement éviter de lorgner du côté des simplifications et des clichés. « Razzia » brasse large, très large, convoquant des personnages de différentes époques et de différents lieux, tous victimes de préjugés, dans le but évident de réclamer davantage de tolérance. Cet objectif ne manque pas de noblesse, bien évidemment, mais les personnages et les situations mis en scène dans le film ressemblent tout de même un peu trop à des stéréotypes pour convaincre entièrement. Le réalisateur semble s’être contenté de dérouler le catalogue de toutes les exactions et de tous les partis pris possibles dans son pays, le Maroc, les illustrant par une galerie d’individus représentatifs et évoluant entre le Haut-Atlas et Casablanca sur une trentaine d’années.
Défilent donc à l’écran un instituteur laïc, un homosexuel, un juif, une femme insoumise et une adolescente en rébellion, chacune et chacun étant la cible d’une répression plus ou moins affirmée. Chaque histoire et chaque personnage apportent leur lot d’émotion, c’est certain, et l’on ne peut que ressentir de la sollicitude pour chacun d’eux. L’instituteur enseignant dans les montagnes de l’Atlas devient la cible d’envoyés du gouvernement parce qu’il parle à ses élèves en berbère et non pas en arabe et parce qu’il leur apprend la poésie (les poètes libres et insoumis ne sont-ils pas toujours persécutés par les autocrates et les dictateurs ?). Le juif de Casablanca essaie de rassurer son père comme il peut : « Il y aura toujours assez de juifs à Casablanca pour nous enterrer », dit-il.
L’homosexuel, qui ne peut afficher sa différence, se réfugie dans la musique. Les femmes aux tenues jugées provocantes risquent d’être injuriées par les passants. Et quand elles veulent danser, il est préférable qu’elles le fassent entre elles. Le courroux des religieux intégristes, au Maroc comme dans beaucoup de pays musulmans, menace volontiers les réfractaires. En tant que spectateurs, on a de quoi être émus et indignés à juste titre et, de ce point de vue, le film atteint son objectif : on le perçoit vraiment comme un vibrant appel à la tolérance. Dommage tout de même que le cinéaste n’ait pas su davantage éviter les schématisations, par exemple en penchant systématiquement du côté de la culture anglo-saxonne dès qu’il s’agit d’affirmer une certaine liberté de penser (la musique du groupe Queen, « Sur la route » de Kerouac et le film « Casablanca » avec Humphrey Bogart sont les références bégayantes du film !).
6/10
Luc Schweitzer, ss.cc.
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RAZZIA Bande Annonce ✩ le nouveau film de Nabil Ayouch (Much Loved)
✩ Les Films à VOIR ? Ils sont ICI ► https://www.youtube.com/playlist?list=PL843D2ED8D80FA673 A Casablanca, entre le passé et le présent, cinq destinés sont reliées sans le savoir. Différe...