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UN DIVAN À TUNIS

Un film de Manèle Labidi.

 

Lorsque, venant de France, Selma (Golshifteh Farahani), psychanalyste de 35 ans, débarque à Tunis avec l’intention d’y ouvrir un cabinet de consultation, elle ironise en désignant la photo de celui qu’elle appelle son « patron » et qui n’est autre que Sigmund Freud, un juif comme elle tient à le souligner. Il faut dire qu’elle n’est pas du genre à se dérober, comme on s’en aperçoit rapidement. C’est une femme qui sait ce qu’elle veut, qui s’affiche sans complexe, avec des cheveux au vent, une cigarette au bec et un corps tatoué !

Cela dit, ouvrir un cabinet de psychanalyse à Tunis, ce n’est pas une mince affaire. Comme le lui dit son oncle, en Tunisie, on n’a pas besoin de ça puisqu’on a Dieu ! Une femme qui tient un salon de coiffure ironise à son tour : les Arabes n’ont pas besoin d’aller chez un psy, ils parlent de leurs problèmes en se faisant coiffer, précisément, ou encore au hammam, et ça leur suffit. Pourtant, même cette femme qui se gausse n’y résiste pas : elle aussi, elle comme bien d’autres, finit par s’allonger sur le divan de la psychanalyste.

Car, bien évidemment, ce que montre ce film, non sans se parer de beaucoup d’humour, c’est qu’en Tunisie, comme ailleurs, le recours à la psychanalyse peut se révéler des plus appropriés. Les patients potentiels ne manquent pas, même s’il en est qui n’ont manifestement pas compris de quoi il s’agit, comme celui qui, entendant parler d’une femme venue de France et d’un divan, s’est imaginé qu’il avait affaire à une prostituée ! Mais la galerie des personnages en souffrance, personnages le plus souvent hauts en couleurs, s’allonge rapidement.

Pour son premier film, Manèle Labidi s’y prend plutôt avec talent, elle parvient à laisser percer, sous la tournure humoristique, quelque chose du mal de vivre de certains Tunisiens. Comme le dit à Selma sa nièce, « tout le monde rêve de quitter la Tunisie et toi, tu viens t’y installer » ! À cela, Selma répond qu’elle est heureuse d’être là, d’autant plus que sa présence en tant que psychanalyste répond à de véritables demandes. Reste néanmoins à se coltiner les lenteurs administratives, ce qui donne lieu à de désopilantes scènes avec une employée du ministère de la santé qui trouve le moyen, au cours d’un entretien, de faire commerce de lingerie féminine ! Il faut compter aussi avec la police, avec un agent énamouré qui se fait fort d’appliquer la loi et ses deux acolytes pas très futés ! Les complications sont telles qu’on a même droit à une séquence de véritable émotion. Au bout du compte, la farce savoureuse a laissé transparaître bien des souffrances.

7,5/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer, ss.cc.

 

 

 

Tag(s) : #Films
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