Un album de chansons de Leonor Bolcatto.
Pour peu qu’on soit assez curieux et qu’on sorte ainsi des sentiers battus, on n’en finit pas de se laisser émerveiller par des voix nouvelles (ou qu’on ne connaissait pas encore). C’est vrai dans tous les domaines de la culture, y compris, singulièrement, dans celui de la chanson française. Il est à remarquer, d’ailleurs, le nombre important de voix féminines dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles ont de quoi piquer la curiosité.
De la curiosité, précisément, j’en ai à revendre et, ayant lu un article sur une chanteuse du nom de Leonor Bolcatto, je me suis empressé d’écouter ses chansons. Or, les ayant écoutées une première fois, je n’ai pas pu ne pas, aussitôt, m’enchanter d’une deuxième écoute. J’étais déjà conquis, j’avais déjà trouvé là une singularité qui me charmait mais aussi qui m’aiguillonnait. Car ce qui distingue un grand nombre des jeunes chanteuses d’aujourd’hui, c’est la liberté du propos. Rien de sirupeux ni de convenu ni de complaisant chez ces artistes-là.
S’il faut chercher un mot qui puisse convenir aux cinq chansons de l’album de Leonor Bolcatto, c’est bien le mot de liberté qu’il faut retenir, me semble-t-il. Cinq titres seulement et pourtant le sentiment, à les écouter, d’une étonnante diversité de styles nourris par la voix fluide, belle, limpide de la chanteuse. L’article qui m’a fait connaître son nom précise que cette voix, « travaillée au fil du temps » est « nourrie de chants traditionnels, puisée aux sources de la Mongolie ou de l’Argentine, pétrie de technique lyrique, qu’elle a exercée dans tous les styles : folklore, chœur classique, ensemble médiéval et même rock » (Francis Panigada sur le site www.nosenchanteurs.eu). Ces multiples influences, Leonor Bolcatto parvient admirablement à les unir, à les harmoniser, à les mettre au service d’une écriture qui exalte la liberté.
Même la première chanson de l’album, qui semble la plus simple des cinq, celle qui invite à s’émerveiller de la poésie des choses ordinaires, ne suppose-t-elle pas que l’on s’affranchisse de toute injonction, de tout impératif ? Ce sont les esprits indépendants qui goûtent le mieux ce qui est ordinaire.
Les quatre autres chansons de l’album, quant à elles, affirment clairement une recherche d’émancipation dans un cadre résolument féministe. Dans Merci bien, c’est le mode ironique qui prévaut. La chanteuse y décline tous les conseils donnés aux femmes pour « être jolie », « toujours sourire » ou « comment [s’]occuper avec soin de [sa] maison et de [sa] famille tout en restant une jolie fille. ». Dans L’horizon dans les yeux, superbe texte inspiré du livre Trois femmes puissantes de Marie N’Diaye, magnifié par un accompagnement musical (instruments et voix) de toute beauté, c’est le combat pour la dignité des femmes, même au prix de l’exil, qui est intensément affirmé : « Qu’y a-t-il, pense-t-elle, au-delà de la ligne / Mon envie est trop forte d’atteindre l’horizon. »
Enfin, c’est sur un mode plus intime, mais non moins pertinent, que s’affirme la liberté d’une femme dans les deux dernières chansons. Dans Serre-moi tout d’abord où, sur un rythme d’abord calme puis très dansant, s’impose, comme un pied de nez au coronavirus et à toutes les règles de distanciation, le rappel d’un bonheur simple, d’une « poésie des choses ordinaires » : « Serre-moi maintenant demain on verra bien / Le bonheur est trop court pour ne pas y goûter / Serrons-nous plus près les uns contre les autres ». Quant aux Allumeuses d’étoiles, qui donne son titre à l’album, c’est la chanson de la liberté d’aimer, même passagèrement : « Est-ce que juste pour une nuit tu veux bien être mon amoureux ? ».
Allez, allumons des étoiles avec Leonor Bolcatto et ses excellents musiciens et complices : Fabien Rybakowski (guitares, charango, chœurs), Jonathan Mathis (arrangements, mixage et multiples instruments) et la participation pour un titre d’Annelise Roche (clarinette, voix). Et vivement d’autres chansons pour pouvoir encore mieux apprécier ce talent !
8/10
Luc Schweitzer, ss.cc.
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Leonor Bolcatto... au firmament
Au creux de nos nuits, faisant fi de l'obscurité d'un espace qui ne laisse de place qu'au vide, scintillent de petites lumières, sources d'énergie et d'espoir. Elles sont vives, animées par le ...
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