Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

LA VRAIE FAMILLE

Un film de Fabien Gorgeart.

 

 

Les quelques scènes qui ouvrent le film ne laissent guère présager ce qui va suivre. Ce sont des scènes qui respirent la joie de vivre en famille. Seule une dispute à propos d’une éventuelle sortie pour faire de l’accrobranche pourrait mettre la puce à l’oreille, mais ce qu’on voit surtout, c’est une famille heureuse de passer du temps ensemble. Une famille modèle, en somme, composée d’Anna (Mélanie Thierry), de Driss (Lyes Salem) et de trois garçons, Adrien, Jules et Simon. Le réalisateur prend le temps de montrer la joie d’être ensemble avant de révéler que Simon, le plus jeune des trois garçons, est un enfant qui a été placé dans cette famille par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) alors qu’il n’avait que dix-huit mois. Cette décision de le mettre en famille d’accueil avait été prise suite au décès de la mère de Simon et, conséquemment, à la dépression dont souffrait son père. Les mois et les années ont passé, Simon a six ans, et voilà que Eddy (Félix Moati), le père, demande à pouvoir obtenir à nouveau sa garde. Le processus qui se met alors en place doit permettre à l’enfant de se détacher, petit à petit, de sa famille d’accueil pour pouvoir, au bout du compte, vivre avec son père.

Mais ce qui, en théorie, devrait fonctionner sans beaucoup d’anicroches se révèle, en pratique, très difficile à accepter, tant du côté de l’enfant que de sa famille d’accueil. Celle qui supporte le plus malaisément la fatalité d’une séparation définitive d’avec Simon, c’est Anna. Pourtant le film s’attache à montrer combien elle est soucieuse de respecter les volontés d’Eddy, le père, quant à l’éducation donnée à l’enfant. C’est le cas, tout spécialement, de son éducation religieuse. Anna veille scrupuleusement à obéir au souhait du père à ce sujet : elle emmène Simon à la messe le dimanche et lui fait dire ses prières chaque soir, alors que rien de tel n’est exigé des deux autres garçons. On remarquera néanmoins qu’à l’approche d’Halloween, c’est Eddy qui achète à Simon une panoplie de vampire, ce qui fait exprimer aux deux autres garçons des réticences, leurs parents estimant qu’il ne s’agit là que d’une fête « commerciale ».

Respecter les desiderata du père quant à l’éducation de Simon, c’est une chose, accepter son départ définitif, c’est autre chose. Le film pose intelligemment la question de la « vraie famille », comme le dit son titre. Simon s’est tellement attaché à sa famille d’accueil qu’il lui est difficile de se résigner à passer désormais tous ses week-ends avec son père (c’est une première étape), il s’est lié d’un lien si fort avec Anna qu’il l’appelle « maman ». Et quand il lui est demandé de ne plus employer ce mot, il peine à s’y résoudre. Le film égrène ainsi tous les obstacles à surmonter pour que le processus aboutisse. Le réalisateur se focalise surtout sur le point de vue d’Anna, ce qui est un choix de bon sens, tant Mélanie Thierry excelle à jouer ce rôle de « maman d’accueil » au cœur brisé, déterminée et fragile à la fois. Par contraste, malheureusement, l’interprétation de Lyes Salem en « papa d’accueil » paraît bien fade. C’est un des seuls points faibles d’un film inspiré à Fabien Gorgeart par ses souvenirs, en particulier par l’histoire de sa mère qui, elle aussi, accueillait chez elle des enfants placés et qui eut beaucoup de mal à se séparer de l’un d’eux. 

7,5/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer, ss.cc.

Tag(s) : #Films
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :