Un film de Quentin Dupieux.
Dans son passionnant essai intitulé De la Curiosité, en s’appuyant sur quelques figures célèbres de curieux, en particulier celle de Dante, mais aussi au moyen du rappel d’exemples mythiques, l’écrivain d’origine argentine Alberto Manguel se plaît à décliner les différents aspects, bénéfiques ou maléfiques, de ce qu’on considère parfois comme un « vilain défaut ». Du côté préjudiciable, l’auteur mentionne le cas fameux de Pandore qui, poussée par sa curiosité, ne put se retenir d’ouvrir la boîte dans laquelle étaient enfermés tous les malheurs du monde.
Le même genre de curiosité est à l’œuvre au début du nouveau conte, d’apparence absurde, de Quentin Dupieux. Un couple, composé d’Alain (Alain Chabat) et de Marie (Léa Drucker) est en train de visiter la maison qu’il se propose d’acquérir. Après avoir fait le tour des pièces, l’homme qui les guide leur annonce qu’il va leur montrer le clou de la visite et, pour ce faire, les amène à la cave où il soulève une trappe s'ouvrant sur un conduit, avant de leur proposer d’y descendre en leur promettant une énorme surprise. Intrigués, curieux de savoir ce que cache cette énigme, Alain et Marie suivent docilement leur guide. Il ne convient pas de trop en dire sur ce qui suit, mais précisons tout de même que la descente du conduit fait faire un saut dans le temps, un double saut même, puisque, d’une part, quand on ressort, l’horloge indique une heure bien plus tardive que celle qui semble s'être écoulée, alors que le corps, lui, a rajeuni de quelques journées.
Le film se poursuit en mettant en scène un deuxième couple, dont le lieu de résidence est proche de celui d’Alain et Marie, qui les reçoivent donc dans leur nouvelle maison. Gérard (Benoît Magimel), qui se trouve être le patron de la boîte dans laquelle travaille Alain, et Jeanne (Anaïs Demoustier), s’ils admirent la propriété de leurs hôtes, semblent surtout désireux (à commencer par Jeanne !) de faire connaître l’incroyable nouveauté qui pimente leur vie de couple. De quoi attiser, une fois encore, la curiosité d’Alain et de Marie qui apprennent donc l’étonnante transformation physique de Gérard qui s’est fait greffer, au Japon, un nouveau pénis, ultra performant puisqu’il est électronique !
Sous son apparence ahurissante et déjantée, mais fidèle au genre de prédilection qui lui réussit si bien, le film de Quentin Dupieux se présente comme un conte philosophique. De quoi est-il question sinon de fantasmes vieux comme le monde ? D’une part, celui auquel assiste Alain sans savoir que faire, celui qui entraîne irrésistiblement Marie jusqu’à la rendre folle, le rêve du rajeunissement, de la jeunesse éternelle, si ce n’est de l’immortalité. D’autre part, celui qui rend dingue Gérard, ce désir fou d’une virilité sans faille, symbole d’une puissance jamais prise en défaut. Sous couvert d’un film d’allure extravagante, le réalisateur propose une critique en règle de deux chimères. Et, qui plus est, il le fait en usant d’une mise en scène jamais banale, osant même une longue séquence sans paroles, uniquement rythmée par la musique, qui laisse pantois d’admiration. À quoi s’ajoute l’excellence du quatuor d’actrices et d’acteurs, toutes et tous parfaitement adaptés aux étonnantes fantasmagories de Dupieux.
8/10
Luc Schweitzer, ss.cc.
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