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THE SON

Un film de Florian Zeller.

 

 

Après The Father, sorti en 2020, film qui avait remporté deux Oscars mérités, dont celui du meilleur acteur pour Anthony Hopkins dans le rôle complexe d’un homme de 80 ans victime des premières atteintes de la maladie d’Alzheimer, Florian Zeller propose l’adaptation américaine d’une autre de ses pièces, The Son. On y retrouve d’ailleurs l’excellent Anthony Hopkins mais, cette fois, dans un tout petit rôle, le temps d’une seule scène, scène au demeurant intéressante car mettant en présence deux hommes, l’ancêtre d’une famille (Anthony Hopkins, bien sûr) et son fils Peter (Hugh Jackman), dans une ambiance à la fois embarrassée et tendue, tant le fils a gardé de la rancune envers un père qui l’a élevé, au temps de son enfance, avec hauteur, sans jamais se mettre à son écoute.

Or, nous voilà bel et bien dans le vif du sujet, sauf qu’il s’agit, dans la majeure partie du film, de Peter et de Nicholas, son fils de 16 ou 17 ans, un fils qu’il a eu avec Kate (Laura Dern), sa première compagne dont il est maintenant divorcé. Peter s’est remarié avec Beth (Vanessa Kirby) avec qui il vient d’avoir un deuxième fils. Très absorbé par son travail, homme apparemment comblé, Peter, qui a laissé la garde de Nicholas à sa mère, semble ne plus guère se soucier de lui. Jusqu’à ce qu’un appel téléphonique angoissé de Kate l’oblige à se préoccuper de son aîné. Ce dernier, en effet, lui apprend Kate, ne va pas bien, il sèche ses cours depuis plusieurs semaines et ne répond pas aux questions qu’on lui pose.

Voici donc un père distant, si ce n’est absent, obligé, par les circonstances, de prendre la mesure de son devoir. Lui qui a refait sa vie, comme on dit, ne peut pas tirer un trait sur le passé. Son fils Nicholas est en phase de dépression profonde et ne peut être laissé à l’abandon. Peter en est conscient et répond à l’appel au secours de Kate en acceptant d’accueillir son aîné chez lui, avec l’accord de sa nouvelle compagne. Or, malgré ce rapprochement entre père et fils, malgré les tentatives sincères mais maladroites de l’un vers l’autre, la blessure du fils semble ne pouvoir se fermer. Même une parenthèse joyeuse où, dans l’appartement, Peter, Beth, rejoints ensuite par Nicholas, se mettent à danser, semble n’avoir pour fonction que de souligner, par contraste, le mal-être d’un grand adolescent qui reproche à son père de l’avoir abandonné.

Florian Zeller s’y prend de manière plutôt habile pour faire percevoir la souffrance du fils d’un côté, le désarroi du père de l’autre. Un père qui se met à aimer sincèrement ce fils, il le prouve, par exemple, lors d’une des scènes les plus intenses du film, quand, avec la mère de Nicholas, ils doivent décider de laisser leur garçon entre les mains des soignants ou le ramener à la maison, mais un père qui se surprend lui-même en répétant, presque mot à mot, les phrases et les intonations qu’il ne supportait pas quand il était enfant et que c’était son propre père qui les lui disait. Pourquoi, devenu adulte, se modèle-t-on malgré soi sur les manières qu’on détestait quand on était enfant et qu’elles émanaient du père ? Quant aux décisions qu’on est amené à prendre en tant que père, même quand elle paraissent guidées par le souci constant du bien-être de l’enfant, comment savoir si elles sont réellement les bonnes ?

Très maîtrisé, échappant autant qu’il est possible aux limites qui s’imposent souvent quand on adapte au cinéma une pièce de théâtre, ce film touchera, sans nul doute, le plus grand nombre des spectateurs qui le verront, tout en alertant sur la difficulté de traiter et de soigner la dépression chez les adolescents.  

7,5/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer, ss.cc.

Tag(s) : #Films, #Drame
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