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TRENQUE LAUQUEN 1 & 2

Un film en deux parties de Laura Citarella.

 

 

Trenque Lauquen, c’est le nom d’une ville d’Argentine, nom qui veut dire « le lac rond » en langue mapuche, à 450 kilomètres au sud-ouest de Buenos Aires, une ville que connaît bien la réalisatrice, une partie de sa famille en étant originaire. C’est là, dans ce lieu qui lui est familier, qu’elle a tourné ce film au long cours, un film diffusé en deux parties, chacune ayant une durée d'un peu plus de deux heures. Ce choix délibéré de ne pas se soucier des contraintes que voudrait imposer le système d’exploitation des films, Laura Citarella le revendique, non seulement par principe mais dans le but de réaliser une œuvre qui ait une « consistance littéraire ».

Celles et ceux qui ont vu, en 2018, les presque 14 heures de film (en quatre parties) de La Flor de Mariano Llinás ne seront pas dépaysés par le film de Laura Citarella. Dès les premières scènes en effet, l’on perçoit comme un air de famille entre les deux œuvres. Et pour cause puisque les deux cinéastes font partie d’un même collectif, El Pampero Cine, qui comporte encore d’autres membres. Il faut espérer que d’autres réalisations de ce groupe parviendront jusqu’à nos salles de cinéma.

Malgré sa longueur (ou, peut-être aussi, à cause d’elle), Trenque Lauquen apparaît comme une œuvre tout aussi passionnante en même temps qu’originale que l’était La Flor. On peut affirmer que, d’une certaine manière, il y a, dans ce film, la rencontre d’univers qui paraissent si éloignés qu’on n’imagine pas qu’ils puissent se rencontrer et fonctionner de concert. En l’occurrence, c’est comme si l’on avait affaire aux aventures de héros de bande dessinée à la manière de ceux de Tintin avec des cinéastes comme Michelangelo Antonioni (celui de L’Avventura – 1960) ou David Lynch.

La première partie du film, en effet, se focalise, en grande partie, sur la recherche d’une femme qui a disparu. Cette femme, Laura, botaniste de profession, s’était passionnée elle-même pour une énigme : elle avait trouvé, en effet, dans des livres empruntés à la bibliothèque, toute une correspondance dissimulée entre des pages collées de certains volumes. Les lettres révélaient une histoire d’amour, datant des années 1960, entre un homme marié et une institutrice du nom de Carmen Zuna. Leur ton était fortement imprégné d’érotisme. La curiosité de Laura à ce sujet semblait insatiable. Or voilà qu’elle-même disparaît mystérieusement, ce qui déterminent Rafa, son compagnon, et Ezequiel, un collègue, à mener leur enquête pour la retrouver.

La deuxième partie du film, quant à elle, se concentre plutôt, précisément, sur le personnage de Laura, sur un message qu’elle a enregistré à la radio, sur les arcanes de la bureaucratie locale, sur un mystère qui surgit du lac rond qui donne son nom à la ville et, surtout, sur la rencontre de Laura avec deux autres femmes, dont l’une qui recherche une plante spécifique dont elle a grand besoin. L’énigme entourant ces femmes débouchera-t-elle sur un éclaircissement ? Peut-être mais, si c’est le cas, c’est, paradoxalement, pour encore davantage épaissir le mystère. Qu’importe d’ailleurs ! Le plus exaltant, c’est n’est pas d’avoir le fin mot de l’histoire mais d’avoir suivi passionnément l’itinéraire d’un personnage formidablement attachant. Avec son style qui prend le temps, mais qui sait aussi relancer l’histoire au bon moment, juste avant que, précisément, le temps puisse sembler trop long, Laura Citarella réussit un film mémorable.   

8/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer

Tag(s) : #Films
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