Un film d’Artus.
Ma réaction, lorsque j’avais vu, à plusieurs reprises, la bande-annonce de ce film dans les salles obscures, avait été de me dire : « Voilà un film que je n’irai pas voir ! ». Mon impression, en effet, à la vue des extraits choisis pour la bande-annonce, avait été négative. Or, il se trouve que, comme on le sait, ce film remporte un énorme succès dans les salles. Je n’ai nullement la prétention d’être infaillible et je sais que, dans certains cas, les bandes-annonces peuvent être trompeuses. Je me suis donc enfin résolu à suivre les foules de spectateurs manifestement, pour la plupart, enthousiasmés par cette œuvre. Eh bien, au risque de décevoir certains de mes lecteurs, il me faut confesser que l’impression que j’avais eu en voyant la bande-annonce non seulement s’est confirmée mais s’est même renforcée. Je vais essayer de m’en expliquer.
Au départ de ce film, il y a, sans nul doute, une intention louable qui est de mettre en scène une joyeuse équipe de personnes handicapées. Comment ne pas approuver un tel projet ? Malheureusement, comme on le sait, les bonnes intentions ne suffisent pas à faire de bons films, elles sont même souvent contre-productives. Et c’est bien le cas, en l’occurrence. Car nous avons affaire, précisément, à un film farci de bons sentiments, de gentillesse dégoulinante, de clichés à ne pas savoir qu’en faire et de gags répétitifs et lourdauds, si lourdauds que cela devient vite assommant (comme la pauvre jeune femme handicapée qui ne cesse de recevoir des coups pendant tout le film) !
Un p’tit truc en plus manque singulièrement de finesse. Son humour est, le plus souvent, vulgaire. Ses personnages sont caricaturaux. Dans le groupe central du film, celui des personnes handicapées, de leurs animateurs et animatrices et des deux malfrats qui se joignent à eux, il n’y a que des gentils. Ce film, en effet, c’est, en quelque sorte, le « p’tit camp retranché » des gentils contre tous les c…ards et fils de p…e du monde. Qu’on me pardonne ce vocabulaire, mais c’est celui qui est employé dans le film. C’en est même un des gags récurrents, un des handicapés ne ratant pas une occasion d’user de ces termes !
C’est d’ailleurs cet aspect de « camp retranché » qui, à mon avis, est le plus détestable dans ce film. Il y a d’un côté les gentils et de l’autre les c…ards ! Même les malfrats sont gentils. D’ailleurs, dès le début du film, le réalisateur, avec ses gros sabots, nous le fait savoir en mettant en scène un dialogue sirupeux entre un des malfrats en train de braquer une bijouterie et un couple de tourtereaux qui s’y trouvaient parce que lui voulait acheter une bague pour elle. À la fin du film, que je ne veux pas dévoiler, il se confirme que même la Fraise (Clovis Cornillac) est un gars gentil.
Alors, me dira-t-on, il n’y a donc que des gentils dans ce film ! Ah ! Non, et c’est bien là le problème. Car, si tout le monde est gentil dans le groupe des handicapés et des personnes qui les accompagnent, il n’en est pas du tout de même à l’extérieur. Il y a plein de c…ards, partout ! Même le chauffeur de bus, que le réalisateur ne nous montre d’ailleurs pas, est un fils de p…e ! Le propriétaire du gite qui reçoit le groupe des handicapés est un c…ard puisqu’il fait savoir que, l’année suivante, il augmentera ses tarifs ! De même pour l’homme qui loue des kayaks et qui n’accepte le groupe des handicapés que sous la contrainte. Et ainsi de suite avec, pour point d’orgue, le petit copain d’Alice (Alice Belaïdi), incapable d’accepter que sa chérie change d’avis, préférant rester avec les handicapés plutôt que de le suivre aux États-Unis : lui aussi est un c…ard sans nul doute, selon les critères de ce film !
En somme, ce film s’inscrit, malgré lui peut-être, dans un courant navrant de notre temps. Combien sont-ils aujourd’hui, dans la société, en politique, dans les religions, les groupes, les partis, les factions qui se définissent contre les autres ? Contre les migrants, contre les réformes dans l’Église et même contre le monde… Avait-on besoin d’un film qui, lui aussi, se raconte comme l’histoire d’un groupe de gentils contre tous les c…ards du monde ? Le fait même qu’un tel film remporte un grand succès n’est pas un très bon signe, à mon avis.
Pourtant, de bons films mettant en scène des personnes handicapées, il y en a eu, ces dernières années, et ils avaient bien davantage de finesse qu’Un p’tit truc en plus. Je pense à Hors Normes (2019) d’Olivier Nakache et Éric Toledano et, surtout, à Give me liberty (2019) de Kirill Mikhanovsky. Deux films qui n’ont pas attiré les foules et qui, cependant, étaient d’un niveau bien supérieur à Un p’tit truc en plus ! Allez comprendre quelque chose aux goûts du public !
4/10
Luc Schweitzer
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UN P'TIT TRUC EN PLUS Bande Annonce (2024) Artus, Comédie
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