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HORIZON : UNE SAGA AMÉRICAINE, CHAPITRE 1

Un film de Kevin Costner.

 

 

Alors qu’il avait connu ses heures de gloire durant l’âge d’or d’Hollywood, le western, après avoir été décliné dans ses variantes « spaghetti » et « choucroute », s’était, petit à petit, raréfié sur les écrans, sans cependant jamais disparaître totalement. Ces dernières années, par exemple, de temps en temps, il en sortait un, quand ce n’était pas une série télévisée qui en revisitait les poncifs. Ce genre, si important pour donner des clés d’analyse de ce que sont les États-Unis, certains cinéastes se targuent, non sans raison, de lui redonner ses lettres de noblesse. Parmi ceux-ci, rares il est vrai, se détache le nom de Kevin Costner. S’il en est un qui croit encore à ce genre et qui lui reste indéfectiblement attaché, c’est bien lui. Après Danse avec les loups, son grand succès (très mérité) de 1990, après l’excellent Open Range (2003), voici le premier volet d’une série de films qui devrait en comporter quatre, intitulés Horizon : Une saga américaine, série de films ayant pour ambition de couvrir quinze ans d’histoire américaine avant et après la guerre de Sécession.

Pour réaliser ce projet gigantesque, Kevin Costner n’a pas lésiné, il s’est engagé tout entier, y compris en investissant son propre argent. Le résultat, à en juger par ce premier chapitre, ne devrait aucunement décevoir les spectateurs, je l’affirme en dépit d’un certain nombre de critiques qui, ici et là, font la moue. Pour ce qui me concerne, au contraire, j’ai été captivé du début à la fin d’un film d’une durée de trois heures.

Certes, il ne faut pas attendre de ce film un renouvellement du genre auquel il se rattache. Kevin Costner assume d’ailleurs le classicisme et de son scénario et de sa mise en scène. Cela étant, le film ne peut, en aucune façon, être qualifié d’académique. Le réalisateur y fait constamment preuve d’un grand savoir-faire, prenant des options qui, même si l’on a affaire aux scènes classiques des westerns, ne laissent aucune place à l’ennui. Cela se concrétise, entre autres, par des partis pris assez radicaux qui accroissent l’intérêt du spectateur. Ainsi, au début du film, la scène ô combien classique d’une attaque d’Indiens décidés à tuer toute une colonie de Blancs est-elle presque entièrement tournée du point de vue d’un groupe de colons réfugiés dans une maison et résolus à vendre cher leur peau. Parmi les membres de ce groupe, se distinguent, entre autres, une jeune femme et sa fille qui, cachées dans un souterrain, seront les seules rescapées du massacre. La radicalité dont fait preuve Kevin Costner pour filmer ces scènes fait penser à un grand classique du western des années 1950, Quand les tambours s’arrêteront de Hugo Fregonese.

On remarquera, d’autre part, le soin avec lequel Kevin Costner adopte des points de vue différents, non seulement celui des Blancs mais celui des Indiens. Dès le début du film, alors que l’on voit deux enfants indiens observer et commenter les gestes de colons blancs voulant s’installer au bord d’une rivière, on perçoit que l’on a affaire à un réalisateur progressiste pour qui le point de vue des Indiens compte autant que celui des Blancs. Cela était déjà flagrant dans Danse avec les loups.

Toutes les scènes habituelles des westerns sont présentes dans ce film. On y retrouve les grandioses paysages américains (magnifiquement filmés) et la galerie des personnages auxquels ce genre nous a habitués. Néanmoins, jamais on n’a le sentiment de revoir exactement ce qu’on a vu dans d’autres films. Le soin apporté aux décors y est pour beaucoup. Ainsi les tipis indiens n’ont-ils pas la forme que l’on connaît si bien. Ainsi la petite ville de colonisateurs se distingue-t-elle de toutes celles qu’on a déjà vus par sa crasse et (on la devine) sa puanteur.

Il en est de même quant aux personnages. Les inévitables hors-la-loi sont peut-être ceux qui ont le moins de singularité, même s’ils frappent par leur particulière cruauté. Kevin Costner lui-même, en cavalier prenant fait et cause pour une prostituée et l’enfant qui lui a été confiée, compose admirablement son personnage. Mais on remarquera précisément la place éminente accordée aux rôles féminins dans ce film, des rôles qui, tout en restant fidèles aux canons du genre, échappent à la banalité. C’est le cas de la prostituée dont je viens de parler, tout comme de la mère et de sa fille qui, après avoir réchappé au massacre du début du film, sont accueillis dans un fort militaire. Leur relation avec deux des soldats ne peut laisser indifférent. « J’ai insisté, explique Kevin Costner, sur la part que les femmes ont prises dans le développement des États-Unis. Il me semble qu’elle n’était pas assez traitée et j’ai voulu réparer cette injustice. »On le voit et je le répète, même si Kevin Costner ne se démarque pas foncièrement des canons du genre « western », son approche est suffisamment spécifique et ses engagements suffisamment intenses pour que ce film échappe aux conventions et suscite non seulement l’intérêt mais l’enthousiasme du spectateur. Vivement la sortie du deuxième chapitre !  

8/10

                                                                                     Luc Schweitzer

Tag(s) : #Films, #Western
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