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LE MOHICAN

Un film de Frédéric Farrucci.

 

Après À son image de Thierry de Peretti et Le Royaume de Julien Colonna, voici, en quelques mois, un troisième film dont l’action se déroule en Corse. Davantage peut-être que les deux précédents, Le Mohican recycle, si l’on peut dire, les conventions du genre mais il le fait avec une rigueur et des choix de mise en scène qui rendent le film captivant. Il faut dire que Frédéric Farrucci, le réalisateur, quand on lui demande quels sont ses cinéastes de prédilection, prononce aussitôt le nom de John Ford. Une telle influence, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle est avisée, se remarque tout au long du film, entre autres chaque fois qu’est tournée une scène de violence. Comme le faisait si bien Ford, Frédéric Farrucci suggère autant, sinon plus, qu’il ne montre, et c’est un choix qu’il convient de saluer.

L’histoire que raconte ce film est relativement simple. Joseph Cardelli (Alexis Manenti), un éleveur de chèvres dont la propriété est située sur le littoral, reçoit la visite d’un chef mafieux local qui veut lui acheter sa terre à bon prix, probablement pour y faire construire un lieu d’accueil pour touristes. Or Joseph reste attaché aux traditions (ses chèvres sont corses, est-il précisé, et non pas alpines, même si elles produisent moins de lait !) et n’entend pas céder son terrain, surtout pas pour qu’il soit bétonné. Mais peut-on s’opposer à la mafia sans être menacé de mort ? Les événements tragiques se succèdent au point que Joseph Cardelli est contraint de fuir dans le maquis, recherché et poursuivi par les mafieux et leurs hommes de main mais aussi, à l’occasion, aidé par des habitants favorables à son combat, tandis que, d’autre part, sa nièce prend en charge le soin du troupeau de chèvres.

Cette histoire de cavale dans le maquis corse est un excellent prétexte, pour le réalisateur, à rendre un hommage appuyé et bienvenu à ce géant du cinéma qu’était John Ford. Dans L’homme qui tua Liberty Valance (1962), l’un des derniers westerns de celui-ci, l’un des personnages énonçait cette formule qui reste célèbre : « Quand la légende est plus forte que la réalité, il faut imprimer la légende. » Or c’est précisément l’invention d’une légende que filme Frédéric Farrucci, celle d’un berger corse qui se rebelle et dont l’histoire, bientôt relayée par les médias, ne tarde pas à devenir le symbole de la résistance d’un peuple face aux projets de bétonnisation et à la toute-puissance de la mafia. Bientôt, l’image de Joseph Cardelli est taguée sur les murs de l’île de beauté, tandis qu’un groupe de musicien chante un hymne à sa gloire. C’est la transformation d’un acte individuel en acte de résistance collective. De ce point de vue, même si le film ne se démarque pas de certains archétypes associés à la Corse, sa relecture d’une idée proprement fordienne ne manque pas de sagacité.   

7,5/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer

Tag(s) : #Films, #Drame
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