Un film de Jin-Ho Hur.
C’est à la violence de nos sociétés, en particulier la violence la plus soudaine et la plus irrationnelle, que nous confronte ce film sud-coréen qui démarre de manière excessivement brutale par l’altercation de deux automobilistes, altercation qui dégénère au point que l’un des conducteurs fonce sur l’autre, le renverse et percute sa voiture dans laquelle se trouve une petite fille. Nous voilà aussitôt dans le vif du sujet. Sauf qu’en vérité, ce qui intéresse Jin-Ho Hur, le réalisateur du film, c’est la question de la famille, tout autant que celle de la violence en elle-même.
En effet, bientôt, la société sud-coréenne est évoquée par le prisme d’une famille, en l’occurrence de deux frères ayant suivi des trajectoires divergentes. L’un, Jae-wan (Sul Kyung-gu), est un avocat qui, amené à intervenir dans la défense de l’automobiliste incriminé dans l’affaire qui ouvre le film, se dévoile comme un homme peu scrupuleux, si peu que seul semblent compter pour lui les moyens pécuniers de ses clients. L’autre, Jae-gyu (Jang Dong-gun) est médecin, travaille à l’hôpital et est amené à soigner la petite fille blessée dans l’accident dont il a déjà été question. Tous deux sont pères : Jae-wan, un veuf qui s’est remarié avec une femme bien plus jeune que lui, a une adolescente de fille qui songe surtout à profiter de l’argent de papa ; Jae-gyu, lui, a un fils, lui aussi adolescent, mal dans sa peau et victime de harcèlement dans son école.
Or, voilà que circule sur les réseaux sociaux une vidéo montrant deux adolescents, un garçon et une fille, tabassant un SDF dans une rue de Séoul. La ressemblance entre les vêtements que portent le garçon et la fille sur la vidéo et ceux que portent le fils de Jae-gyu et la fille de Jae-wan ne laissent place à guère d’incertitude : ce sont eux qui ont commis ce forfait, forfait qui pourrait bien devenir une affaire criminelle en cas de décès du SDF.
C’est en se fondant sur cette sinistre et terrible affaire que le réalisateur s’emploie à explorer les ressorts de la société sud-coréenne, confrontée à des fractures sociales, à des manquements graves quant à l’éducation des plus jeunes, aux pressions diverses qui s’exercent sur eux, etc. Entre parents et enfants, le dialogue et l’écoute véritables semblent mis à mal de façon irrémédiable. Jin Ho-Hur se garde de donner des réponses faciles aux questions et son scénario, servi par des acteurs irréprochables, réserve des surprises quant aux réactions et aux décisions prises par les deux pères. La scène finale provoque un choc (dont, bien sûr, je me garde de révéler la nature).
7,5/10
Luc Schweitzer
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