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LE GRAND JEU

Un film de Aaron Sorkin.

 

 

« Les enfants de ce monde sont plus habiles les uns avec les autres que les enfants de la lumière », affirme Jésus après avoir raconté la parabole d’un gérant malhonnête ayant fait preuve de beaucoup d’habileté dans ses affaires (Lc 16, 8). Ce film de Aaron Sorkin qui, après avoir été scénariste et créateur de séries télévisés, a pris la casquette de réalisateur ne raconte pas autre chose. Molly Bloom, avec son nom tout droit venu d’un fameux roman de James Joyce (« Ulysse »), le personnage central du film, joué de façon plutôt charismatique par Jessica Chastain, donne l’exemple même de la détermination et de l’intelligence mises au service de ses propres intérêts.

Les quelques faiblesses du film ne viennent pas de son sujet, un sujet certes déjà abordé par d’autres cinéastes avec davantage de savoir-faire (pensons à Martin Scorsese et son « Loup de Wall Street » en 2013), mais de la surabondance des points de vue. « Qui trop embrasse mal étreint », comme on dit, et Aaron Sorkin a probablement surchargé son film. Curieusement, celui-ci alterne sans arrêt entre des scènes qui vont à toute vitesse et d’autres qui donnent l’air de faire du sur-place. Entre la jeune Molly championne de ski à bosses et la femme d’affaires contrainte de s’expliquer longuement à l’avocat chargé de la défendre, le film peine à trouver sa juste mesure. Le spectateur est emporté par un tourbillon, puis risque de sommeiller un peu quand il s’agit d’écouter des dialogues explicatifs. On a sans doute affaire à un film ayant trop d’ambition et passant sans arrêt d’un point de vue à un autre sans savoir approfondir ses aspects les plus intéressants : le bling-bling, les arnaques, le procès, les liens familiaux, tout s’entremêle, tantôt éveillant l’intérêt, tantôt fabriquant un peu de lassitude.

Ne soyons pas trop sévères. Le film n’est pas raté, il est encombré. Mais il offre de grands moments de cinéma et de superbes séquences d’émotion. Les retrouvailles d’un père et de sa fille, lors d’une des dernières scènes du film, comptent parmi ses instants les plus intenses. Car, si « les enfants de ce monde » ne manquent pas d’habileté pour servir leurs propres intérêts, le film montre aussi leurs failles, grandes et petites : celles qui entachent les liens familiaux, mais aussi celles qui sont provoquées par les jalousies, les envies et les rivalités. Une femme gagnant beaucoup d’argent en organisant des jeux clandestins de poker risque fort d’engendrer de terribles convoitises. Et, dans ce milieu-là, on ne fait guère de sentiments ! 

7/10

 

                                                                       Luc Schweitzer, ss.cc.

Tag(s) : #Films
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