Un film de Maïwenn.
La moindre des choses, la première question à se poser, quand non seulement on se met soi-même en scène mais qu’on puise dans sa propre histoire, dans ses propres expériences, pour faire ce qu’on appelle de l’autofiction, porte sur la place accordée (ou non) au spectateur. Y aura-t-il un espace de respiration pour lui ou ne sera-t-il que l’observateur d’une histoire dont il n’a que faire ? Malheureusement, si l’on en juge par son film, Maïwenn ne s’est pas posé cette question, elle ne l’a peut-être même pas effleurée. L’affiche elle-même donne le sentiment que le premier souci de Maïwenn, réalisatrice et actrice, a été de s’exhiber elle-même, elle et sa quête des origines, plutôt que se préoccuper de toute autre question. On la voit au milieu d’une foule indistincte, elle seule montrant son visage rayonnant à l’objectif du photographe. Comme si elle était au centre de tout et prenait plaisir à s’exhiber et que les autres ne comptaient pas.
Ce malaise, on le ressent durant une grande partie du film, et pas seulement parce qu'on en a déjà vu l’affiche. Maïwenn semble se plaire et se complaire à raconter son histoire de quête d’identité jusqu’à une sorte d’exhibitionnisme malséant. Le film, néanmoins, donne lieu à deux scènes réussies, belles, presque émouvantes. L’une est placée au début du film et montre, dans un Ehpad, une famille rassemblée autour d’Emir, le grand-père algérien atteint de la maladie d’Alzheimer. C’est l’occasion de feuilleter un grand livre relatant, au moyen de textes et de photos, le parcours et, en particulier, les engagements de militant du patriarche dont la vie ne tient plus qu’à un fil. La deuxième scène intéressante du film se situe, elle, tout à la fin, quand Maïwenn déambule en Algérie, dans ce pays dont elle éprouvait une sorte de nostalgie, et que se fait entendre, en voix off, des paroles d’Emir, le grand-père défunt.
Car le film relate la mort et les funérailles de ce dernier, puis la quête des origines de Maïwenn qui, au moyen de prélèvements de salive et d’analyses ADN, veut en savoir davantage sur sa propre identité. Tout cela donne lieu à une suite de querelles familiales qui nous laissent de marbre. Le sujet devrait s’y prêter mais, hormis lors des deux scènes que j’ai évoquées, il est peu probable que le reste puisse provoquer quelque émotion que ce soit chez le spectateur. Ces querelles incessantes autour du choix du cercueil, de la couleur d’un tissu, d’un texte à lire ou non le jour des funérailles, du passage ou non à la mosquée (le défunt n’aimait pas les religions !), tout cela ne génère qu’ennui et, parfois, consternation. En effet, le ton du film étant plutôt tendu, voire dramatique, Maïwenn a cru bon d’y injecter quelques plages légères, voire comiques, généralement confiées au personnage joué par Louis Garrel. Or toutes ces scènes sont ratées, elles ne font pas rire, elles peuvent même être aberrantes, comme lorsque Louis Garrel se met à raconter une blague douteuse sur les pédophiles ! Comment peut-on intégrer dans un film une scène d’une telle maladresse ? C’est atterrant. Comme est accablant le besoin de s’auto exhiber.
4/10
Luc Schweitzer, ss.cc.
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ADN Bande Annonce (2020) Maïwenn, Film Français
ADN Bande Annonce (2020) Maïwenn, Louis Garrel, Fanny Ardant © 2020 - Le Pacte