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MEMORY

Un film de Michel Franco.

 

C’est de manière progressive, par petites touches, que Michel Franco, le réalisateur, nous familiarise avec les deux personnages principaux de ce film, tout en préservant, d’ailleurs, jusqu’au bout, une part de mystère. Au début, c’est Sylvia (Jessica Chastain) que nous découvrons lors d’une séance de paroles des AA (Alcooliques Anonymes). Nous percevons aussitôt que nous avons affaire à une femme au passé douloureux et ce d’autant plus que nous découvrons qu’elle est la mère d’Anna (Brooke Timber), une adolescente qu’elle aime jusqu’à la surprotéger, au point de vouloir contrôler ses activités sur internet.

Sylvia est habitée, nous le devinons, par une grande souffrance et lorsqu’un soir, elle est invitée à une fête, elle se met à l’écart et ne parle avec personne. Or, voilà que, subitement, un homme s’approche d’elle et se met à lui tourner autour. Apeurée, Sylvia fuit vers le métro pour rentrer chez elle. Mais l’importun ne la lâche pas d’une semelle, prend le même métro qu’elle et la suit jusqu’à son domicile. Une fois dans sa maison, Sylvia se barricade puis regarde par la fenêtre. L’homme est là, alors que le temps est maussade. Le lendemain matin, l’inconnu est toujours là, endormi sur un pneu.

Qui est cet homme ? Que veut-il ? On se demande, à ce moment-là, si l’on va avoir affaire à un thriller. Mais non : pris en charge par une ambulance appelée par Sylvia, Saul (Peter Sarsgaard) révèle ses propres fêlures, sa mémoire qui part en capilotade. Plusieurs fois, l’on se demande encore, au cours du film, s’il ne va pas s’agir d’un thriller, d’autant plus qu’interviennent bientôt les familles respectives de Sylvia et de Saul : la mère de Sylvia qui semble surtout habile à raviver les blessures de sa fille en niant la gravité de ce qui s’est passé autrefois, la sœur de Sylvia, rongée du remord de n’avoir pas agi à l’époque où elle aurait pu la secourir, le frère de Saul qui semble désireux d’enfermer celui-ci en le privant de toute autonomie.

En fin de compte, c’est dans un registre mélodramatique, très réussi, que s’inscrit le film. En dépit de leurs épreuves, malgré les obstacles, malgré tous ceux qui voudraient réduire à néant leur histoire commune, Sylvia et Saul non seulement s’entraident mais s’aiment d’un amour plus fort que tout. Deux êtres fragilisés, l’un perdant progressivement la mémoire, l’autre blessée à jamais par les abus subis durant son enfance, s’unissent, incompris de tous sauf d’une seule personne, Anna, la fille de Sylvia, qui se fait la complice de leur amour. Ainsi sommes-nous conduits, au moyen d’un scénario remarquablement construit et d’une réalisation tout en finesse, vers un final tout de surprise et de beauté.  

8/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer

Tag(s) : #Films, #Mélodrame
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