Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

HERE

Un film de Bas Devos.

 

 

Il n’est nullement nécessaire de concevoir des scénarios sophistiqués pour faire de bons films. Le réalisateur belge Bas Devos donne ici l’illustration parfaite de ce qu’on peut faire avec un scénario qui, comme on dit parfois, pourrait tenir sur un timbre-poste. Ce minimalisme, pleinement assumé, donne lieu à un film tout en délicatesse et d’une beauté qui fascine. Pourtant, rien d’autre n’est filmé ici que les décors banals du quotidien mais ils le sont avec un soin et une précision tels qu’on croirait que chaque plan est un tableau. Le format carré de l’image, la justesse des cadrages, tout s’adapte merveilleusement à cette impression de constante beauté que dégage le film.

Lent et contemplatif, le film met en en scène deux exilés, un homme d’origine roumaine et une femme d’origine chinoise, et leur rencontre fortuite. Lui, Stefan (Stefan Gotaest), on le découvre sur un chantier dont il est l’un des ouvriers. C’est son dernier jour de travail avant quatre semaines de vacances estivales. On le voit, entre autres, bavarder avec des collègues de travail à qui il explique qu’il a l’intention d’aller en Roumanie pour y voir sa famille et, en particulier, sa mère. Peut-être même décidera-t-il de rester là-bas. Avant de partir, il se préoccupe et de vider son frigo et de faire réparer sa voiture. Elle, c’est Shuxiu (Liyo Gong), une jeune femme d’origine chinoise dont on découvre qu’elle est chercheuse et enseignante en biologie. Parfois, pour rompre sa solitude, elle rend visite à sa tante, qui tient un restaurant. C’est un des lieux où, précisément, Stefan et Shuxiu se rencontrent et échangent quelques mots.

Le réalisateur nous familiarise lentement, doucement, avec chacun de ces deux personnages, avec leur quotidien, les quelques personnes que chacun fréquente, mais, davantage encore, leur solitude. Par ce biais, très habilement, Bas Devos invite aussi à changer de regard sur ce qui semble on ne peut plus banal, un environnement auquel on risque de s’habituer au point de ne rien voir. C’est ainsi que, par petites touches, on en vient à découvrir ce qu’il y a aux abords des villes : des espaces de nature, de bois, proches des lignes de chemin de fer et pourtant grouillants de vie.

En effet, alors qu’il projette de chercher sa voiture dans un garage, Stefan rencontre, une nouvelle fois, Shuxiu, tout occupée à un travail de recherche sur les mousses. Elle explique à Stefan que c’est sa spécialité, ces mousses qui poussent si abondamment dans les sous-bois mais auxquelles on ne fait guère attention. « Elles furent parmi les premiers êtres vivants à apparaître sur Terre, explique Shuxiu, et elles subsisteront quand l’homme aura disparu de la surface terrestre. » En les étudiant, on peut apprendre bien des choses.

Épousant le rythme lent d’une rencontre sur fond de contemplation de la nature, rencontre dont les suites, si elles ont lieu, sont laissées à notre imagination, le réalisateur invite à ouvrir son regard sur ce à quoi on ne fait guère attention. Pour peu qu’on soit davantage attentif, il y a, dans notre environnement, mille beautés dont on pourrait faire mille tableaux.  

8/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer

Tag(s) : #Films
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :