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LES MEUTES

Un film de Kamal Lazraq.

 

 

Kamal Larzaq, dont c’est le premier long-métrage, reprend à son compte les codes du film noir mais pour proposer une véritable plongée dans la nuit de Casablanca, un voyage au bout de la nuit du côté des marginaux et des malfrats, avec cette originalité de raconter une histoire qui confine à l’absurde.

Hassan et son fils Issam, des habitants d’un quartier pauvre de Casablanca, ne se font pas trop prier pour travailler, à l’occasion, pour la pègre locale. C’est ainsi qu’Hassan reçoit pour mission l’enlèvement d’un homme qui doit être livré à une bande de mafieux. Ayant besoin d’être secondé, Hassan parvient à convaincre son fils de l’accompagner. Mais l’affaire tourne mal : l’homme est bel et bien enlevé et placé dans le coffre d’un véhicule, mais il a été bâillonné et cagoulé de telle sorte qu’il ne peut plus respirer. De ce fait, Hassan et Issam se retrouvent bientôt avec un cadavre sur les bras et un cadavre dont les mafieux ne veulent pas (ils le voulaient vivant !). La suite du film ne raconte donc, en somme, qu’une chose : l’odyssée jusqu’au bout de la nuit d’Hassan et Issam cherchant un moyen de se débarrasser du corps.

Ce film dont toute l’action se déroule au cours d’une seule nuit, c’est donc, au gré des errances du père et du fils, comme une immersion au cœur des bas-fonds de Casablanca : tout un monde parallèle défile sous nos yeux, un monde interlope qui, s’agissant du Maroc, n’avait guère été montré au cinéma jusqu’à présent. Cela étant dit, cet aspect du film, s’il ne manque pas d’intérêt d’un point de vue informatif, risque de paraître lassant aux yeux de certains spectateurs du fait de son systématisme, d’autant plus que tout est filmé de la même manière, avec surabondance de gros plans. On a un peu le sentiment que le réalisateur a imaginé son scénario rien que pour pouvoir filmer, l’un après l’autre, tous les lieux les plus malfamés de Casablanca. D’un autre côté, on saura gré au réalisateur d’avoir dépeint avec réalisme une réalité sociale marquée par la précarité et l’exclusion.

Le choix des acteurs non professionnels, quant à lui, augmente la crédibilité du film. Nul doute que ce que montre le cinéaste correspond à la véritable misère sociale telle qu’on peut la trouver au Maroc. Un autre atout du film provient des deux rôles principaux, ceux d’Hassan et Issam, non seulement bien encombrés avec un cadavre dont il faut trouver le moyen de se débarrasser avant que le soleil se lève mais, qui plus est, le plus souvent en désaccord sur ce qu’il convient de faire. Le plus surprenant, c’est que, même dans la circonstance qui est la leur, interviennent, parfois, des questions de morale ou de rite funéraire. Ainsi le père tient-il à laver soigneusement le corps du défunt avant de trouver un moyen de l’éliminer. Entre père et fils, c’est tantôt l’un et tantôt l’autre qui prend l’ascendant. Ainsi va le film, au gré de rencontres, parfois étonnantes, parfois inquiétantes, parfois violentes, dans une nuit peuplée d’individus louches, de groupes agressifs, de chiens féroces. Jusqu’au bout de la nuit, dans un climat à la fois sinistre et presque absurde.   6,5/10

 

                                                                                                   Luc Schweitzer

Tag(s) : #Films, #film noir
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