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LE LABYRINTHE DU SILENCE

un film de Giulio Ricciarelli.

 

Hasard du calendrier: c'est au moment même où est jugé à Lunebourg, dans le nord de l'Allemagne, Oskar Gröning, l'ex-comptable du camp d'Auschwitz, (probablement le dernier procès d'un nazi), que sort sur nos écrans ce film. Premier long-métrage du réalisateur germano-italien Giulio Ricciarelli, "Le Labyrinthe du silence" retrace minutieusement l'enquête menée à la fin des années 50 par quelques acharnés afin de confondre des criminels de ce même camp d'Auschwitz et de les traduire en justice. C'est grâce à leur ténacité qu'ont pu être jugé 19 anciens SS lors du procès qui s'est tenu à Francfort entre 1963 et 1965.
Mais, avant d'en arriver au procès, il a fallu bien du courage et de la volonté à la poignée d'hommes qui s'était juré de briser la chape de silence qui s'était abattue sur l'Allemagne de ces années-là. A la fin des années 50, personne ne voulait plus s'encombrer du passé nazi. Konrad Adenauer lui-même estimait qu'il convenait de tourner la page. Et les jeunes générations ne connaissaient pas même le nom d'Auschwitz.
Si tout a changé et si le procès de Francfort a pu avoir lieu, c'est parce qu'un procureur du nom de Johann Radmann, qui s'ennuyait à ne traiter que de banales infractions de la route, s'est, par un concours de circonstances, pris de passion pour cette cause. Soutenu par sa hiérarchie et par quelques collègues, il s'est battu contre tous les obstacles, toutes les inerties et toutes les menaces, afin de mener à bien un devoir de justice qui s'est révélé, au fil de l'enquête, être aussi et surtout un devoir de mémoire.
Car il ne suffisait pas de retrouver les noms des criminels du camp d'Auschwitz, mais il fallait aussi retrouver des témoins, des rescapés, et les convaincre de s'exprimer. Ce n'était pas chose facile, il s'en fallait de beaucoup. Le film s'attarde assez longuement sur l'un d'eux, un homme ayant perdu sa femme et ses deux filles, des jumelles, emportées dans l'horreur par le sinistre tortionnaire Josef Mengele. "Dieu était absent à Auschwitz", dit-il à Johann Radmann, avant de le supplier de se rendre sur place et de dire en son nom le Kaddish qu'il n'avait pas pu prononcer jusque là pour ses filles, lui-même étant malade et ne pouvant plus entreprendre le voyage.
C'est un film passionnant, captivant et émouvant qu'a réalisé Giulio Ricciarelli. Un film dossier qui échappe à peu près complètement à la pesanteur qui encombre parfois ce genre-là. Ici, on ne s'ennuie pas une seconde et on se dit que les quelques acharnés qui ont osé réveiller une Allemagne amnésique en la confrontant à son passé récent méritaient bien cet hommage.

8/10

Luc Schweitzer, sscc

Tag(s) : #Films
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