LES ENFANTS DES AUTRES

23 Septembre 2022

Un film de Rebecca Zlotowski.

Dans ses films précédents, à chaque fois, d’une manière ou d’une autre, Rebecca Zlotowski s’était efforcée de sortir des sentiers battus, soit en optant pour un décor particulier (une centrale nucléaire dans Grand Central), soit en optant pour des sujets ou des personnages peu ordinaires (des médiums dans Planétarium), soit du fait d’une recherche plus ou moins sophistiquée de mise en scène. Malheureusement, à chaque fois, il en résultait des films inaboutis, parfois très décevants (comme dans le cas d’Une Fille facile). Rien de tel avec Les Enfants des Autres, film maîtrisé de bout en bout, se passant totalement de grands effets, ne convoquant que des personnages qu’on peut dire ordinaires, sans que ce terme ait la moindre connotation péjorative, au contraire puisque l’on a affaire, cela ne fait pas de doute, au film le meilleur, à ce jour, de notre réalisatrice.

Des situations telles que celle qui est racontée dans ce film, bien des spectateurs, sans aucun doute, en auront été les témoins ou en auront été eux-mêmes les protagonistes. En tenant compte tout de même d’une particularité qui s’applique aussi bien au théâtre qu’au cinéma ou encore aux romans : en règle générale, dans les œuvres de fiction, les rôles de belles-mères sont attribués à des marâtres, ce qui n’est pas du tout le cas dans le film de Rebecca Zlotowski. On y a même affaire à l’exact opposé.

Ce à quoi nous assistons, dès les premières scènes du film, c’est à la constitution de ce qu’on appelle habituellement aujourd’hui une famille recomposée : situation on ne peut plus courante de nos jours. En l’occurrence, c’est Rachel (Virginie Efira) et Ali (Roschdy Zem) qui se rencontrent parce qu’ils fréquentent le même cours de guitare. Ils se raccompagnent l’un l’autre, vont jusqu’à l’appartement d’Ali et font l’amour. Une histoire commence, mais avec une invitée dont Rachel ne perçoit d’abord la présence que par un dessin d’enfant et un prénom sur une porte : Leïla. C’est ainsi qu’elle comprend que celui dont elle vient de tomber amoureuse est le père d’une fillette dont il a, le plus souvent, la garde (on ne verra la mère, jouée par Chiara Mastroianni, que bien plus tard).

Cette enfant qui, bientôt, apparaît dans le film, Rachel n’éprouve aucune difficulté à l’aimer aussitôt et, rapidement, à prendre une part de sa garde, sinon de son éducation. Il n’y a que bienveillance chez Rachel, d’autant plus que, dans le même temps, elle apprend par son gynécologue qu’il ne lui reste que peu de temps pour avoir elle-même un enfant si elle veut en avoir un. Il y a certainement, chez Rachel, un désir d’enfant, cela se ressent dans le rapport qu’elle entretient avec la petite Leïla ou encore quand elle apprend que sa sœur est enceinte.

Par petites touches, très finement, Rebecca Zlotowski donne à percevoir les bonheurs et les tristesses ou les manques de Rachel, bonheur de donner de son temps à Leïla, peine d’avoir peut-être trop attendu pour avoir elle-même un enfant. Son affection, elle la reporte sur Leïla, petite fille qui, le plus souvent, accepte la présence de l’amoureuse de son papa, mais pas toujours : « Pourquoi Rachel est-elle toujours à la maison ? », demande-t-elle à une occasion.

Les Enfants des Autres, ce n’est rien d’autre qu’une histoire simple et touchante, celle d’une famille recomposée, avec ses bonheurs, ses doutes, ses échecs. Avec, tout de même, une petite touche supplémentaire, qui n’est pas anecdotique, car elle en dit long sur le beau personnage joué par Virginie Efira. Il se trouve, en effet, que Rachel est enseignante et qu’on la voit, à plusieurs reprises, se battre pour un de ses élèves en échec scolaire, afin qu’il puisse trouver sa voie malgré tout. Les « enfants des autres », c’est, au bout du compte, aussi bien cet élève-là que la petite Leïla.

8,5/10

Luc Schweitzer, ss.cc.

LES ENFANTS DES AUTRES Bande Annonce (2022)

https://www.youtube.com/watch?v=twu6S7Jkr3E

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