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THE FATHER

Un film de Florian Zeller.

 

 

Écrivain, Florian Zeller avait, jusqu’à présent, fait ses preuves en tant qu’auteur de romans et, surtout, de pièces de théâtre. Or, passionné par le grand écran, le dramaturge a eu l’excellente idée d’adapter l’une de ses pièces les plus célèbres au cinéma. Coup d’essai, coup de maître qui lui a valu de remporter un triomphe aux Oscars.

Ce n’était pourtant pas gagné d’avance, car c’est toujours une prise de risque que de faire un film à partir d’une pièce de théâtre. Ce qui fonctionne parfaitement sur scène peut, éventuellement, paraître bien ennuyeux lorsque c’est projeté sur grand écran. Le défi qui se présente à qui a des velléités de faire du cinéma de cette manière-là, c’est, pourrait-on dire, de ne pas se détourner du théâtre, d’en respecter certaines conventions, tout en donnant le sentiment qu’on fait autre chose. Même s’il s’agit d’un huis-clos ou d’un quasi huis-clos, le cinéma offre des possibilités que la scène ne permet pas, ce que Florian Zeller a parfaitement su intégrer dans son long-métrage.

Je ne saurais, cependant, faire des comparaisons, puisque je ne connais que le film, mais, ce que je peux dire, c’est que, d’un point de vue cinématographique, le pari est réussi. Il faut dire que Florian Zeller a fait appel, pour incarner les deux personnages principaux, à la crème des interprètes. Peut-on rêver mieux qu’Anthony Hopkins, qui garde son prénom dans le film, pour jouer le rôle-titre, le père, homme de 81 ans qui connaît de sérieuses fuites de mémoire et en vient à perdre tous ses repères ? Et qui peut-on souhaiter de mieux qu’Olivia Colman (actrice dont on a déjà pu apprécier le talent dans la série The Crown) pour jouer Anne, la fille d’Anthony ? Tous deux se donnent à fond dans leurs rôles respectifs et sont extraordinaires.

Mais le film offre mieux encore que de grands numéros d’acteurs. Car Florian Zeller l’a composé de manière incroyablement subtile, de façon à mettre, en quelque sorte, les spectateurs eux-mêmes dans la tête d’Anthony. Comme si, avec lui, nous devions, nous aussi, perdre nos repères, que ce soit du point de vue de l’espace comme de celui de la temporalité. Les scènes successives, qui font intervenir d’autres personnages, des infirmières ou aides à domicile par exemple, nous les percevons, nous aussi, spectateurs, avec la confusion qui s’empare de l’esprit d’Anthony. Des objets disparaissent, Anthony s’imagine qu’on l’a volé, il croit être chez lui quand il est dans l’appartement d’Anne, etc. On ne sait jamais, sur le coup, si ce qu’on voit à l’écran est réel, ou si c’est le produit de l’esprit embrouillé d’Anthony. Ce choix de mise en scène, très convaincant, donne au film un caractère unique, inédit. Peut-être nous fera-t-il aussi changer nos regards ? Quand nous aurons affaire à des aînés qui, comme on dit parfois, perdent la boussole, nous saurons peut-être faire davantage preuve de patience avec eux. Ce film bouleversant nous y invite très fortement, c’est sûr. 

8/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer, ss.cc.

Tag(s) : #Films, #Drame
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