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EMPIRE OF LIGHT

Un film de Sam Mendes.

 

 

À quelque chose malheur est bon, comme dit le proverbe. À l’instar de quelques autres réalisateurs du 7ème art, Sam Mendes a mis à profit la période de confinement imposée pendant la crise du COVID pour replonger dans ses souvenirs d’adolescence et ainsi imaginer le scénario de ce film, un film dont l’un des deux personnages principaux, celui d’Hilary, interprétée avec une admirable justesse par Olivia Colman, est inspiré par sa mère, une mère qui souffrait de troubles bipolaires.

Dans le film, Hilary est une quinquagénaire travaillant en tant que gérante à l’Empire, un cinéma de la ville de Margate, petite cité côtière au nord de Douvres. Le lieu n’est pas sans magie et on peut même le considérer comme un personnage à part entière du film. Situé en bord de mer, le bâtiment monumental ne passe pas inaperçu, tandis que son intérieur, avec sa couleur rouge, se pare d’une beauté qui semble immuable. Même le dernier étage, laissé à l’abandon, livré aux pigeons, n’est pas sans poésie. Le cinéaste filme admirablement ces lieux, au point qu’on a parfois le sentiment que les personnages évoluent dans un décor à la Edward Hopper.

Le cinéaste nous familiarise aussitôt avec les divers employés du cinéma, les ouvreurs, le projectionniste, le directeur (qui abuse de son autorité pour obtenir des faveurs sexuelles de la part d’Hilary). Et puis, apparaît un petit nouveau, un jeune Noir qui a trouvé ce job en espérant pouvoir bientôt intégrer une université. Il se prénomme Stephen (Micheal Ward), il est beau et élégant, mais sa couleur de peau ne peut être considérée comme négligeable dans l’Angleterre de Margaret Thatcher, au début des années 80, une Angleterre minée par le chômage, un chômage qui lui-même exacerbe le racisme.

Or, ni la différence d’âge ni celle de la couleur de peau ne peuvent empêcher la naissance d’une idylle entre Hilary et Stephen, leur lieu de rendez-vous privilégié étant l’étage désaffecté du cinéma. Le film alors va et vient entre de nombreuses scènes d’une grande douceur et celles qui ramènent les protagonistes et, en particulier, les amants, à la dure réalité : d’une part les troubles psychiques dont souffre Hilary, de l’autre les expressions du racisme qui gangrène la société anglaise de cette époque.

Pourtant, même si le film est imprégné d’une bonne dose de mélancolie, en fin de compte, il en rejaillit quelque chose de beau et de paisible qui fait du bien. Ce ne sont pas les skinheads et leur haine qui ont le dernier mot. Ce n’est pas non plus la maladie psychique d’Hilary. Non, mais bien plutôt le pinceau de lumière qui vient éclairer l’écran de cinéma rien que pour Hilary, le jour elle en fait la demande, elle qui a travaillé tant et plus à l’Empire sans jamais pouvoir s’y asseoir en tant que spectatrice, et puis, un peu plus tard, la simple beauté d’une poésie lue dans un train. 

8/10

 

                                                                                                   Luc Schweitzer, ss.cc.

 

Tag(s) : #Films
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