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LE PRIX DU PASSAGE

Un film de Thierry Binisti.

 

 

Ces dernières années, plusieurs films ont abordé le sujet de la migration, le plus souvent avec pertinence et justesse du propos. Après Welcome (2009) de Philippe Lioret, Le Havre (2011) de Aki Kaurismäki, Les Survivants (2022) de Guillaume Renusson et d’autres films encore, celui de Thierry Benisti ne démérite pas, d’autant plus que sa trame s’appuie sur l’expérience de sa scénariste Sophie Gueydon, qui a elle-même collaboré avec des associations à Paris et à Calais et a rencontré de nombreux migrants ayant pour objectif de parvenir en Angleterre.

C’est bien de cela dont il est question dans le film de Thierry Benisti, un film entièrement construit autour de la rencontre de deux personnes : d’une part, une jeune femme prénommée Natacha (Alice Isaaz), une serveuse (qui, d’ailleurs, perd bientôt son emploi) endettée de toute part et ne sachant comment s’y prendre pour élever son fils Enzo (même si elle peut compter sur l’aide de la grand-mère du garçon) et, d’autre part, un migrant irakien prénommé Walid (Adam Bessa) qui a échoué là en attendant de pouvoir traverser la Manche. Dès le premier contact entre ces deux personnages intervient un arrangement financier : Walid demande à Natacha de pouvoir utiliser ses sanitaires pour prendre une douche, ce que la jeune femme accepte volontiers mais à la condition d’être payée.

En vérité, on a affaire à deux personnes qui ont un besoin urgent de gagner de l’argent, suffisamment pour sortir, même momentanément, de la précarité : Natacha pour payer ses dettes, faire réparer sa chaudière en panne, subvenir aux besoins de son garçon et s’émanciper de sa mère ; Walid pour réunir la somme réclamée par son passeur. Ces deux êtres vulnérables font alliance pour s’en sortir, quitte à profiter à leur tour de la détresse des autres, en organisant des passages de migrants vers l’Angleterre. C’est Walid qui trouve les candidats ayant suffisamment d’argent, tandis que Natacha leur fait traverser la Manche en les cachant dans le coffre de sa voiture. Les risques sont grands mais le stratagème fonctionne.

Le but du cinéaste n’est pas de porter un jugement sur de tels personnages, mais plutôt de montrer comment des êtres dans la détresse peuvent être amenés à tirer profit, à leur tour, de ceux qui sont plus faibles qu’eux. Et puis, plus le film avance, plus il adopte l’allure d’un thriller. La tension ne cesse de grandir, non seulement parce que chaque passage vers l’Angleterre est une aventure, mais aussi parce que le trafic organisé par Walid et Natacha n’est pas du goût des mafieux locaux qui considèrent qu’il s’agit là de leur chasse gardée. En s’orientant sur ce terrain-là, si le film perd quelque peu son côté naturaliste du début, il gagne en intensité dramatique puis, pour finir, ose une sorte de parabole sur le changement des regards et la naissance d’une amitié.   

7,5/10

 

                                                                                     Luc Schweitzer

 

 

 

Tag(s) : #Films, #Thriller
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