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C'EST EXTRA

Un album de 13 reprises de Léo Ferré par La Souterraine.

 

 

Mort il y a 25 ans, le 14 juillet 1993, Léo Ferré n’en a pas moins continué, depuis lors, de vivre par le biais de ses textes, de ses compositions, de ses chansons, de ses productions musicales et poétiques très abondantes. Nombreux sont les chanteurs qui, déjà du vivant de leur auteur, ont puisé dans les chansons de son répertoire, comme ce fut le cas, en particulier, pour Catherine Sauvage. Or, depuis la mort de Ferré, des reprises de ses chansons n’ont cessé de paraître, preuve qu’elles n’ont rien perdu de leur pertinence. Pour beaucoup de chanteurs d’aujourd’hui, Ferré reste, à juste titre, non pas un modèle (le mot ne convient pas pour l’auteur des « Anarchistes »), mais plutôt, pour reprendre le titre d’une des chansons, « un copain d’la neuille », quelqu’un avec qui on se plaît à passer du temps, un artiste, un musicien, un poète.

Après le groupe « Les Faux Bijoux » (2001), après Môrice Bénin (2002), Bernard Lavilliers (2009), Catherine Lara (2011), après bien d’autres interprètes et en attendant un album de Cali (à paraître bientôt), voici donc les reprises de 13 chansons par le groupe « La Souterraine », un groupe qui, même s’il a choisi de donner pour titre général de l’album celui d’une chanson archi célèbre (« C’est extra »), ne l’a pas reprise sur celui-ci, mais a préféré la sélection de 13 titres moins connus. Pas de « C’est extra » donc ni d’ « Avec le temps », mais un ensemble de titres judicieusement choisis pour mettre en évidence la diversité des styles et des inspirations de Ferré : des chansons des débuts de l’artiste, comme « À Saint-Germain-des-Prés » ou « Vitrines », et des chansons de la maturité, comme « La Nuit », des chansons de l’intimité et de la tendresse, comme « Si tu t’en vas », et des chansons de révolte, comme « Les Anarchistes ».

Ce qui surprend, dans cet album, c’est la liberté d’interprétation des membres du groupe « La Souterraine ». Les chansons semblent presque réinventées par des arrangements musicaux originaux et des voix qui, souvent, donnent l’impression de slamer plus que de chanter d'une manière classique. Cela n’aurait sans doute pas déplu à Léo Ferré qui, tout au long de ses années de création, a fait preuve de multiples curiosités musicales et d’une variété de styles étonnante. On le considère d’ailleurs, à cause de certains de ses titres (tel « Il n’y a plus rien »), comme un précurseur du rap et du slam. Les interprétations de La Souterraine, en tout cas, du fait de leur singularité, font redécouvrir la qualité et l’à propos de textes qui émeuvent et questionnent encore.

Je n’ai pas besoin de louer la beauté du poème d’Aragon (« Est-ce ainsi que les hommes vivent ? »), seul texte de l’album non écrit par Ferré, mais celui-ci, qui se considérait d’abord comme un musicien, n’en avait pas moins le talent qu’il fallait pour écrire. Certes il cédait parfois à la facilité, mais ses trouvailles dans l'écriture des textes étaient souvent excellentes et, même s’il faut admettre que leur qualité est variable, beaucoup d'entre eux sont ceux d’un vrai poète, un de ceux qui, comme il l’écrivait dans « À Saint-Germain-des-Prés », ont « rendez-vous avec Verlaine » et sont « flanqués d’Apollinaire ». Et puis, qu’on le veuille ou non, beaucoup de ses chansons continuent d’interpeller, elles ont gardé de la vigueur. Les révoltes de Ferré étaient-elles excessives ? Pas sûr. En tout cas, elles étaient souvent justifiées et n’ont rien perdu de leur bien-fondé : ainsi « Vitrines », chanson écrite en 1953 (bien avant mai 68 !) et critiquant déjà la société de consommation !  

9/10

 

                                                           Luc Schweitzer, ss.cc.

Tag(s) : #Chansons, #Musiques
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