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Un livre de Thierry Frémaux.
Dès l’annonce du décès de Bertrand Tavernier, survenue le 25 mars 2021, de nombreux hommages furent écrits par toutes sortes de gens, professionnels du cinéma mais aussi amateurs passionnés, ce dont je me fis moi-même l’écho sur ce blog. Mais le livre qui vient de paraître aux éditions Grasset nous parvient comme un témoignage particulièrement précieux, puisqu’il émane d’un de ceux qui connurent et fréquentèrent le cinéaste durant de nombreuses années, précisément depuis juin 1982 jusqu’à sa mort. Directeur de l’Institut Lumière de Lyon et délégué général du festival de Cannes, Thierry Frémaux, et on ne peut que l’en remercier, nous livre aujourd’hui un portrait de Bertrand Tavernier qui nous fait ressentir encore plus intensément combien il nous manque, combien l’on aimerait l’écouter, encore et encore, nous parler des films des autres comme, bien entendu, de ceux qu’il avait lui-même réalisés.
Ce n’est pas en hagiographe qu’écrit Thierry Frémaux, il se garde de minimiser ce qu’il pouvait y avoir d’excessif chez Bertrand Tavernier, un homme si passionné, si entier, qu’il pouvait épuiser ses auditeurs. Il ne s’encombrait pas non plus de manières, un certain savoir-vivre lui faisait totalement défaut. « Le suivre, l’écouter, écrit Thierry Frémaux, était exténuant ; on aurait voulu parfois appuyer sur le bouton pause, ne serait-ce que pour réfléchir à ces titres de films qu’il distribuait de façon enivrante, à ces artistes dont il déclinait les noms à l’infini comme s’il se les récitait à lui-même. » « Tout le monde se souviendra de quelqu’un qui avait tout vu, tout entendu, tout lu. »
Cela étant écrit, il convient aussitôt, comme le fait Thierry Frémaux, d’insister sur la générosité extrême du cinéaste, toujours en déplacement ici ou là pour soutenir un festival, un ciné-club, parler de tel film, de tel réalisateur. Ses connaissances, il ne demandait qu’à les partager sans compter, soucieux de faire redécouvrir des cinéastes plus ou moins tombés aux oubliettes dont il estimait qu’il fallait les en sortir. Son dernier film d’ailleurs, qui fut un documentaire, Voyage à travers le cinéma français (2016), en donne la parfaite illustration, tout comme ses nombreuses participations à des bonus de DVD.
Thierry Frémaux le rappelle également, Bertrand Tavernier ne fut pas célébré unanimement par tous les critiques. Il fut même copieusement détesté par ceux qui écrivaient dans le journal Libération ainsi que dans Les Cahiers du Cinéma. Depuis son premier film en tant que réalisateur, L’Horloger de Saint Paul en 1974, jusqu’à Quai d’Orsay (2013), son dernier film de fiction, il fut systématiquement conspué par les critiques de ce quotidien et de ce magazine. Pourquoi ? Peut-être, comme le suggère Thierry Frémaux, parce qu’il se gardait comme de la peste de tout esprit de chapelle et fit appel, pour ses premiers films, aux scénaristes Jean Aurenche et Pierre Bost, qui avaient été parmi les cibles favorites de François Truffaut, selon lui des spécimens d’un certain cinéma français qui avait fait son temps. Et l’on reprocha donc à Bertrand Tavernier de tellement aimer le cinéma de papa qu’il le pratiquait lui-même. C’est à se demander si les critiques des Cahiers du Cinéma prenaient vraiment la peine de regarder les films du réalisateur de La Vie et rien d’autre, de Capitaine Conan et de tant d’autres œuvres remarquables.
Avec Thierry Frémaux, c’est une tout autre chanson qui nous est fredonnée, celle d’une grande amitié, indéfectible, sans ombre. Le livre abonde non seulement en anecdotes mais en témoignages, en confidences même, sur un réalisateur, un cinéphile, un lecteur, insatiable, dont on mesure souvent, depuis son décès, à quel point l’on aimerait qu’il soit encore là.
8/10
Luc Schweitzer, ss.cc.
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Bertrand Tavernier - Wikipédia
Bertrand Tavernier, né le à Lyon et mort le à Sainte-Maxime, est un réalisateur, scénariste, producteur et écrivain français. De 1982 (année de sa création) à sa mort, il a également ét...